Séance shopping

Mais quelle idée l'avait pris d'aller au centre commercial dans un tel moment de la journée ?
Ah oui.. Il fallait racheter des croquettes pour Ronron et elle avait aussi besoin de se racheter des sous-vêtements.
Si l'idée d'un sous-vêtement féminin avait tendance à aiguicher les esprits en imaginant dentelles et sexy, ce n'était pas le cas de Solveig qui cherchait simplement à avoir quelque chose de confortable à mettre, au grand désarroi de son copain.
Elle avait également se racheter un pyjama, voulant un habit tout doux et tout chaud pour cocooner dans son studio, en lisant des articles de journaux, de revues scientifiques ou même des romans, parfois.
Avec un chocolat chaud, c'était la journée typiquement parfaite.

Mais en attendant, la journée était bien loin d'être parfaite... Beaucoup trop de monde et de bruits, ça l'angoissait.
Pourquoi cette femme la regardait de travers ? Et elle ? Et eux ?
Ce n'était quand même pas le sandwich qu'elle mangeait sur le pouce qui leur faisaient envie ? Non, l'une des personnes mangeaient une glace.
Intriguée par ces divers regards à son égard, Solveig se regarda à travers l'un des miroirs de la galerie... Sa blouse, elle avait oublié de l'enlever.

Elle eut un rire nerveux, en comprenant que cela intriguait les gens. Mais cette blouse, c'était comme une seconde peau pour elle. Elle la portait si souvent qu'elle l'oubliait.


- Bon... Ce n'est pas grave, tu as oublié ta blouse mais tu ne peux pas la mettre dans ton sac. Ce n'est pas grave. On ne va pas t'agresser parce que tu portes une blouse. D'autres ont un style bien plus fantaisiste.

Le sac préalablement mentionné était un simple sac à main, contenant simplement son porte-monnaie et ses tickets de transports. Et son nanocom qu'elle avait éteint pour ne pas être embêtée.
L'environnement était déjà trop étouffant pour elle, à la limite d'être anxiogène. Elle faisait au mieux.

Elle se remit en route, direction la boutique de sous-vêtements.

Arrivée devant la dite boutique, elle lâche un grand soupir... La boutique était chargée de monde.
Que faire ? Affronter la cohorte de clients, s'y frayer un chemin et arracher de quoi se repaître vestimentairement parlant ? Hors de question.  Aller chercher les croquettes d'abord ? Non plus... Elle n'allait pas les porter tout le long. Revenir un autre jour ? Elle avait déjà réussi à venir ici, ce serait bête de repartir maintenant.
Il allait bien y avoir une accalmie !

Elle décida donc de se poser sur le banc face à la boutique, non sans avoir été chercher une glace qu'elle dégusta tout en lisant une revue qu'elle venait d'acheter également.
Bon, ce n'était pas aussi poussé que les revues qu'elle lisait habituellement mais au moins, elle était dans sa bulle.

Pendant un certain temps, les passants du centre commercial pouvaient voir sur l'un des bancs une jeune femme, en blouse blanche, manger une glace et lire tranquillement une revue scientifique.

Tournant délicatement les pages de la revue de vulgarisation, tout en mangeant sa glace, Solveig en venait à se demander pourquoi ces papiers avaient peu de considération de la part du corpus scientifique.
Elle trouvait ça toujours passionnant. Pas que la matière, mais la forme aussi. On pouvait écrire différement sur un même sujet, mêlant ainsi la vie d'un être à la Vie. Par exemple, en lisant certains articles de Sora Akai, on pouvait y déceler une certaine amertume.
Enfin, c'est ce que Solveig y voyait.

Quelque chose vint perturber sa lecture, un bruit.
Il y avait pleins de bruits dans le centre commercial, mais Solveig y était assez hermétique. Allez savoir pourquoi ce bruit la perturbera.

Elle se redressa... Et fronça les sourcils.
Où était-elle, déjà ?
Regardant autour d'elle, lentement, elle comprit où elle se trouvait. Encore une fois, elle s'était perdue dans les sciences.

-Désolée... Je voulais pas te déranger. Sale journée. Pas facile pour quelqu'un comme moi de se saper comme elle veut...

Solveig sursaute, plaquant son magasine contre son torse, comme si elle se parait d'une armure.
Mais le geste fit sauter le petit pot de glace, heureusement vide, par terre.
Elle regarde la jeune femme d'un air surpris et reste ainsi figée quelques secondes.
On pouvait également lire, dans son regard, une certaine frayeur, laissant penser que Solveig était le stéréotype de l'étudiante un peu anthrophobique.

- Heu... Bonjour. Il n'y a pas de mal.

Solveig se décontracte légèrement, reposant le magasine sur ses genoux puis récupérant le pot de glace à ses pieds.
Puis elle regarde la jeune femme, la détaillant de haut en bas, puis de bas en haut. Par curiosité, rien d'autres.
Non, elle ne lui disait rien.

- Vous avez du mal à vous vêtir parce qu'il n'y a pas votre taille ? Pourtant, vous êtes dans la norme, ça ne devrait pas poser de problèmes.

Ou alors c'était le style vestimentaire qui posait problème ? Sans être banal, il n'était pas spécialement très recherché non plus.
Le fait qu'elle soit une turne ne lui vint même pas.

Un léger silence, que Solveig se força à parler.

- J’attends que la boutique se vide un peu…. Apparemment, ils ont reçu de nouveaux kigurumi, ces pyjamas complets. J’aime beaucoup, mais vraiment… Trop de monde.

J’ai dit une bêtise pour qu’elle me regarde de la sorte ?

Sans trop savoir pourquoi, hormis qu’elle la regarde, Solveig se sent… Gênée ? En tout cas, elle n’est pas très à l’aise et n’avait qu’une envie : fuir cet étrange regard.
C’est alors que l’autre ferme les yeux puis les réouvre : iris noire. Turne.
Quelques secondes, tout au plus. Mais il n’en fallait pas plus pour que Solveig se rende compte de sa bouche, plaçant sa main devant sa bouche en « O ».

- C'est pas tellement une question de taille. Plutôt une question de gènes. Apparemment, je suis trop dangereuse pour zoner au milieu des culottes.

- Oh pardon, je n’avais pas compris. J’espère ne pas vous avoir vexée…

Solveig se gratta l’arrière de la tête, l’air toujours gênée.

Elle doit me prendre pour une gourde… Je ne fais vraiment pas honneur à cette blouse.
La réflexion s’était faite, tête baissée, regard portée sur le vêtement, honteuse.

- Qu'il y ait du monde ou non, je pense pas qu'ils me laissent entrer... j'ai pas d'Omni, moi. Pourtant... T'as raison, ils sont mignons, ces pyjamas... Et toi, c'est lequel qui te fait envie...?

Elle ne semble pas en prendre ombrage, en tout cas.
La question sort Solveig de son léger état d’apitoiement et lui fait porter son regard sur la boutique.

- Celui de chat, incontestablement. Peu original, c’est sûr, mais c’est pour aller de pair avec Ronron. On fera deux chats à la maison.

L’idée de s’imaginer toute la journée, dans le pyjama, Ronron sur les genoux la fit sourire.
Un sourire doux, innocent et assez communicatif.
Et il ne fallait surtout pas oublier le chocolat chaud.

- Travailler toute la journée, dans des pyjamas, j’aime beaucoup. Impossible quand on est au laboratoire, mais chez moi si ! Et avec un chocolat chaud. Ronron à côté, c’est parfait.

L’attitude de Solveig avait changé. Un peu plus rayonnante et moins abattue que précédemment.
Un sujet qui la dérangeait, ou une action dérangeante de sa part, la faisait se renfermer. Tandis que quelque chose plus souriant, comme la pensée de passer du temps avec son chat tout en travaillant, lui rendait le sourire.
Ce genre d’attitude pouvait aisément la faire passer pour quelqu’un dans sa bulle. Voire « autiste », même si ça n’était pas le cas.

- C’est assez injuste de vous refusez l’accès pour ce que vous êtes. J’en suis sincèrement désolée.

Puis, elle eut une idée.

- Ecoutez, je supporte difficilement l’attroupement… On y va ensemble et je vous avance le pyjama ? Au moins, ça sera plus sympa.

C’était peut-être un peu fou de faire cette précision à une inconnue, mais la jeune femme semblait apprécier les kigurumis.
Elle ne pouvait donc être mauvaise.

- Je suis Solveig, et vous ?

- Y'a pas de soucis. La seule chose vexante, c'est de pas avoir autant de choix que les autres pour gérer ma garde-robe.

Solveig ne comprenait pas vraiment cette notion de "garde-robe".
C'était typique du sexe féminin, on ne parlait pas de ça pour les hommes. Mais une femme, ça devait avoir pleins de vêtements à se mettre ! Et du coup, le placard devait, forcément, craquer sous le poids des habits.
Fort heureusement pour elle, ce n'était pas du tout son cas.

- Euh... Oui, pourquoi pas, si ça te dérange pas...? C'est pas risqué pour toi? J'ai aucune idée de ce qui se passe si je rentre en même temps qu'un citoyen...

La proposition semblait convenir à la jeune fille, Skye donc.
Tant mieux, même si ce n'était pas grand-chose, mettre un nom sur une tête rassurait, plus ou moins, la jeune étudiante au FATE.
Ca pouvait amener à des situations parfois rocambolesque, mais... L'angoisse, c'était difficile à gérer.

- Concrètement, moi non plus ! Mais l'on peut supposer que, comme pour tout ce qui sert à différencier les pré-évolués et les turnes, le système doit se baser sur la détection et l'analyse de l'omnipuce.

Sans faire attention, elle avait utilisé l'expression de Sora Akai.
A la première lecture, elle avait trouvé, dans ce terme, une certaine violence, pour finalement le trouver adapté.
Si l'humain vivait encore, c'était uniquement grâce au dôme. Hors, les turnes pouvaient y vivre en dehors.
Au vu du contexte actuel, les turnes avaient donc "évolués" pour survivre. Pas les humains.

- On peut également supposer que le système ne soit pas si complexe. Une sorte de binarité. Si une personne avec une puce cherche à entrer, alors la porte s'ouvre.  Si pas de puce, la porte ne s'ouvre pas ou une alarme retentit. Je ne pense pas que ça dissocie les personnes entrantes, on peut toujours essayer de passer ensemble, non ? Et au pire, j'expliquerai !

Quant à savoir quoi expliquer, elle ne savait pas vraiment.

Solveig se releva donc, rangeant son magasine dans son sac et jetant le pot à glace dans la poubelle juste à côté.

- Tu as un chat qui s'appelle Ronron, alors...? Je viens d'en recueillir un, moi aussi...

- Oh félicitation ! Comment vous l'a.. Tu l'as appelé ? Tu veux que je te montre Ronron ? Il est si mignon !

Elle récupéra son nanocom dans son sac, qu'elle alluma.

- Désolé, il est un peu lent et vieux... Il faudrait que je m'en rachète un. J'irai à la boutique informatique, après. Ca me permettra de voir pour un serveur tiens ! Tu t'y connais en informatique ?

Solveig pouvait avoir l'art, inconscient, de passer du coq à l'âne.
On pouvait trouver cela fatigant, mais c'était un signe, quand on la connaissait bien, qu'elle était plus ou moins à l'aise.

- Ah c'est bon !

Sa mine s'assombrit quelques instants, en regardant l'écran de l'appareil.
Apparemment, elle avait reçu un message "Mais t'es partie où encore ? On devait...", d'un certain "Vincent".

- Ah zut... Bon, pas grave ! Je lui répondrai plus tard.

Elle supprima la notification et ouvrit l'album photo, avant de montrer une photo de son chat à Skye

- Tadaaaaaaam !


Grand sourire, Solveig ne semblait pas douter que son chat n'avait pas forcément quelque chose de rassurant.
C'était peut-être pour cela que Jojo se moquait du nom : Ronron n'était pas forcément adapté.

Photo montrée, Solveig rangera son nanocom, non sans l'avoir éteint.

- Bon, allons-y.

Puis elle se dirigera vers la boutique, avant de s'arrêter quelques mètres devant la porte.
Là, elle prendra la main de Skye dans la sienne, avant de s'avancer d'un pas rapide.

- A nous les kigurumis !!

- J'ai fini par l'appeler... Hélice. Comme l'ADN. Parce qu'elle a deux queues...

Farfouillant dans son sac, Solveig n'écoutait que d'une oreille.
Cela ne l'empêcha pas de comprendre "Hélice", "ADN", "Deux queues". Elle stoppa ses mouvements et regarda à nouveau, à priori, sa "nouvelle copine".

- Oh ! C'est cocasse ! C'est mon domaine de prédilection en plus ! Enfin, ce dans quoi je veux travailler, et je travaille. Mais en tant qu'étudiante pour le moment. Je suis sur la dernière ligne droite ! Ma thèse, mais le sujet est complexe. Tu travailles dedans aussi ? Ou c'est une sorte de loisir ?

Elle s'était remise à farfouiller dans son sac, écoutant la possible réponse de Skye, avant de brandir fièrement son téléphone et de lui montrer "Ronron".

Petite remarque sur son désir de passer dans une boutique informatique pour la suite.

- Oh, euh... Doucement, oui, en autodidacte. C'est pas mon domaine de prédilection.

Autodidacte ? Voilà qui plaisait à Solveig.

- Je trouve ça génial ! On me considère comme telle aussi, mais ce n'est pas vraiment vrai. Je me suis toujours fait soutenir par tout un tas de connaissances, format papier ou numérique. Mais parce que j'ai vu beaucoup de choses sans qu'une personne ne me "l'apprenne", on me considère comme telle. Ridicule.

Elle sourit sincèrement à Skye.


Et puis les voilà devant la porte, main dans la main.
Solveig se disait qu'avec leurs mains ensemble, dont la sienne était porteuse de l'omnipuce, ça serait hypothétiquement moins suspicieux.

La porte s'ouvrit sans problème et elles entrèrent.
A son grand étonnement, personne ne leur sauta dessus. Au "bonjour" de la vendeuse, Solveig y répondit, avant de pousser un soupir de soulagement.
Puis, comme une enfant agitée, elle alla dans le rayon des kigurumis, tout en se frayant un passage à travers les autres clients.
Par ailleurs, Solveig n'était pas très à l'aise, mais elle concentra son esprit sur l'objectif de cette expédition en territoire hostile : un chat pyjama... Et Rose !

Arrivées devant, Skye semblait plutôt intéressée par un en forme de panda.
A peine le prit-elle que Solveig était sur elle, tenant le sien dans une pochette qu'elle lui montra : un kigurumi chat, rose fluo.

- Il y en a un à ma taille !

Ce n'était pas très compliqué, Solveig n'ayant pas une taille atypique et étant plutôt dans la moyenne. C'était justement ce fait qui lui faisait redouter la rupture de stock.

- Si je prends celui-ci, tu m'abandonnes pas le temps que je choisisse des sous-vêtements, hein?

- Oh tu as pris le panda ? Il est chou aussi !

"Abandonner" ? Le terme était étrange et puissant, un peu trop pour Solveig.
Elle sentit quelque chose d'assez inexplicable qui ne la rendait pas très bien. Peut-être sa propre peur que Skye l'abandonne ici, avec tous ces gens ? Possible.

- Ne t'inquiète pas, on y va ensemble. Je dois voir pour moi également. Par contre... Je ne sais pas où c'est. Ah si, là-bas !

Elle avait pointé du doigt, l'étale juste à côté des pyjamas. Les sous-vêtements présents étaient du genre sobre, sans chercher à faire naître une quelconque envie de batifolage.
Vulgairement : des culottes de grand-mère.

- Ou il y a là-bas aussi...

Dit-elle d'un ton plus hésitant, en voyant les sous-vêtements plus orientés... Erotisme.
Noir, rouge, en dentelle, offrant des vues plongeante sur la poitrine.
Solveig se mit étrangement à rougir en voyant cela.

- Heu... Moi, les plus simples me suffisent... Mais toi ?

Solveig n'était pas du genre à espérer quoi que ce soit, mais là, c'était le cas.
Espérer ne pas aller au rayon "sexy", qui d'une était presque de l'autre côté et où il y avait plein de mondes, notamment des couples, mais aussi parce qu'elle rougirait comme une tomate en voyant, et en imaginant, ces sous-vêtements en action.

Le fait que Skye soit au N.E.S.T surpris légèrement Solveig, avant qu'elle ne se souvienne qu'étant Turne, c'était le seul établissement accessible.
On disait que l'apprentissage, là-bas, était difficile. Le jugement des professeurs qui pouvaient leur faire lâcher prise et chercher un établissement moins "à problèmes", les élèves qui ne devaient pas toujours être facile avec leur mutation, et l'animosité ambiante qui pouvait avoir des répercussions sur l'apprentissage.
Mais Skye était autodidacte et c'était certainement ce qui l'aidait grandement dans l'établissement et dans sa quête de savoir.
Le flegme apparent de la jeune femme ne pouvait aider Solveig à comprendre qu'elles étaient assez proches concernant l'acquisition du savoir, cette sorte de passion dévorante.

- J'ai aussi tendance à apprendre après avoir amassé toutes les connaissances d'un sujet, pour ensuite les connecter et en tirer autre chose. Y'a rien de plus fort que de créer un lien logique, comme un pont qui amène vers un résultat plus ou moins lointain...

Quelque chose se réveille en Solveig, comprenant que si, elles avaient bien la même approche.
Oui, avoir plusieurs points et trouver les connectiques, c'était ce qu'elle adorait.
Sans rien dire, elle sourit à Skye. Ca faisait du bien de rencontrer ce genre de personne.
Pis elle était Turne, donc mise de côté, un peu comme Solveig même si la concernant, elle était plutôt l'investigatrice, inconsciente, de cette mise à l'écart.


Dans le magasin, après avoir choisi son kigurumi, Solveig attendait de savoir vers quel rayon voulait se diriger Skye.
Avec appréhension, toujours : beaucoup trop de monde dans le rayon. L'idée d'être aussi proche des autres faisait déjà naître une certaine angoisse.

- Moi, je vais plutôt essayer des trucs dans ce genre-là, je pense... Y'en a même des roses, si tu veux les porter avec ton kigurumi!

Flûte.
Pas le temps de dire préférer rester et l'attendre là que Skye l'attrape par la main et l'entraîne vers le rayon.
L'effroi semble grandir au fur et à mesure qu'elles s'en approchent, sur le visage de Solveig. Ainsi qu'une certaine gêne en voyant tous ces vêtements dont le but est de mettre en avant les organes sexuels, même les protubérances mammaires.

La masse de clients s'approchent à grands pas, et la poigne de Solveig se renforce inconsciemment sur la main de Skye.
Skye qui s'enfonce alors dans la population, passant à travers un rideau de personnes, entrainant Solveig à son tour.

Hésitante, Solveig se fait tirer et son hésitation la fait bousculer une première personne.

- Par... Pardon.

Elle ne résiste pas à la force du choc qui la projette sur une autre personne, bredouillant à nouveau des excuses.
Tient-elle toujours la main de Skye ? Elle ne la sent plus.
La masse humaine se referme sur elle, certain lui jettent un bref regard avant de porter leur attention sur un hypothétique achat.

Tient-elle toujours la main de Skye ? Elle ne la sent plus. Elle sent quelque chose sur sa main, une main, mais est-ce bien celle de Skye ? Est-ce que ce n'est pas un gros type qui va apparaître et qui est en train de l'amener à lui ?

- Sk... Skye ?

Elle étouffe, la  poitrine oppressée et compressée. Poitrine sur laquelle elle porte sa main, amenant des regards de la gente masculine sur la dite poitrine, mais aussi de la gente féminine.

"D'où tu mates c'te planche à pain ?"

Une planche à pain ? Où ?
Solveig tourne la tête autour d'elle, à la recherche du dit-objet, avant de se rappeler que c'était une expression pour signifier qu'une fille n'avait pas une taille de seins conséquente.

"Te fais pas d'idées ! C'est la blouse que je trouve bizarre ! Qui porte ça ?"

La blouse... La blouse... C'est d'elle dont on parle ?
Elle raffermit sa poigne sur Skye, qu'elle a l'impression de ne plus voir, perdue dans la masse.

- Skye... Attends... Attends-moi.

Miracle, elle ressort de la "masse", se retrouvant devant le rayon, à côté de Skye.
La traversée pouvait n'avoir duré que quelques secondes, ça avait semblé beaucoup plus long à Solveig.
Le visage rougi et la respiration lourde, elle était tremblante avec quelques larmes aux yeux.
La sensation d'oppression, toujours présente, diminuait légèrement en se sachant à côté de la jeune femme.
Mais les idées et pensées de Solveig restaient dans tous les sens, incapables de se concentrer. Les discussions et les rires alentour continuait à la stresser, faisant pointer une crise d'angoisse.

- 3... 3,14... 3.141 592... 3,141 592 653...

Oui, pour se calmer, Solveig énonçait à voie haute le début de Pi.

-J'suis désolée, j'avais aucune idée que ça serait compliqué pour toi...

Quelques mots lâchés, mais Skye se rend facilement compte que Solveig n'est plus dans un état de conscience "normal".

Lorsqu'elle la traîne dans une cabine, après avoir attrapé l'étudiante, Skye pouvait se rendre compte de la mollesse de Solveig, à se demander si ses jambes n'allaient pas se dérober à ses pas et chuter.
Heureusement, ce ne fût pas le cas.

Dans la cabine, Solveig se laissa manipuler par Skye qui la fit s'asseoir sur le banc. Marmonnant toujours le nombre PI.

-Ca va aller? J'suis pas fan du shopping, mais alors toi, c'est à un autre niveau...

La question semble percer le brouillard dans lequel l'esprit de Solveig se perd. Ce brouillard qui la protège de tout cet extérieur, et ce depuis toute petite.
Toute toute petite.
Les lèvres de Solveig cessent de remuer, tandis qu'une lueur plus "consciente" passe à travers son regard. Elle semble néanmoins perdue.

- Ca va... Aller ?

Répéta-t-elle à haute voix, comme cherchant à comprendre le sens des mots.

- ... Ca... Va... Aller ?

Les sourcils de Solveig se froncent, tandis que son visage reste impassible, donnant l'impression qu'un bout de conscience essaie de réveiller la jeune femme, de la faire sortir de sa léthargie.
Ses doigts s'agitent, se mêlent entre eux, s'entremêlent, tandis qu'elle mordille ses lèvres.

Puis soudainement, tout s'arrête.
Isolée de l'origine de son angoisse, son inconscient semble avoir travaillé à la réconcilier avec la réalité.
Skye, à ses pieds, elle montre une certaine surprise, avant de regarder autour d'elle, et de se rendre compte qu'elle est dans une cabine, en sécurité.

- Merci, et... Désolée. Je supporte difficilement le monde... Ca m'angoisse.

Mais il y avait plus que de l'angoisse et Solveig ne semblait pas s'en rendre compte.
Elle aurait pu expliquer pourquoi elle était ainsi : toujours préféré ses livres ou ses écrans, n'a jamais été très particulièrement sociable ou attiré par la compagnie des autres. Quelques-uns dérogeaient à la règle, comme son ami "Jojo" qu'elle avait revu il y a peu. Ou encore pour son copain, mais là aussi, c'était spécial.

-Ca va aller, respire. On est tranquilles ici, pour le moment.

C'est ce à quoi Solveig s'attèle, sans tarder.
Reprenant son souffle et contrôle d'elle-même. Le léger tremblement de ses membres s'atténue.

-Tu me dira quand tu te sentira prête pour aller à la caisse... Si tu veux, je t'accompagne pour terminer tes courses.

- Oui, encore merci. A la boutique d'informatique, ça ira mieux. Patron me fait toujours une petite place et s'assure qu'on ne m'embête pas trop.

Solveig regarde ses pieds, l'air sincèrement désolée. Puis, elle remarque enfin les sous-vêtements attrapés par Skye.
Elle bloque sur l'imprimé léopard. Un sourire naît, avant de s'élargir puis de se mettre à pouffer de rire.

- Quelle étrange chose !

Elle se penche en avant pour attraper le sous-vêtement et le regarder sous toutes les coutures.
Elle se redressa, mettant le vêtement au niveau de son entrejambe, tout en tirant sur les côtés et l'appliquant au coin des hanches. Avant de se remettre à pouffer de plus belle.

- Jamais je n'oserai mettre ça.

Elle reporte son attention sur Skye, lui souriant, avant de se rendre compte que, peut-être, cette dernière aimait porter ceci.
Subitement, elle arrêta son manège et lui tendit la chose.

- Désolée, je ne voulais pas me moquer de tes goûts. Je crois que ma crise t'a arrêté dans ce que tu voulais voir, non ? Et tu avais l'air d'y tenir. On... On peut y retourner, si tu veux, j'irai doucement.

Légèrement hésitante, Solveig n'avait pas l'envie d'être un poids pour Skye, surtout qu'elle l'appréciait.
En y allant doucement, sans se presser, en faisant attention et en se concentrant sur l'objet, cela devrait aller.
Et puis, il ne fallait pas oublier que Skye était là "illégalement" et que son attitude pouvait les percer à jour...
Non, Solveig n'avait pas le droit de mettre Skye dans l'embarras.

"Tout va bien ici ?"

Le rideau venait d'être tiré, légèrement, révélant à Solveig et Skye, une femme de la boutique.
Solveig s'empresse de se lever et de s'approcher d'elle, masquant légèrement Skye sans le vouloir.

- Oui Madame, je vous remercie. J'ai simplement eu un coup de chaud, amplifié par les personnes présentes au rayon. Ma... Petite amie m'a donc amené ici.

Elle venait de... Mentir ?
La voix légèrement tremblante, espérant que ça passe et que le personnel ne cherche à aller plus loin. Mais lesdits tremblements pouvaient largement être expliqués par le reste de "coup" de chaud.

- Je m'excuse à nouveau du dérangement.

- T'en dis quoi, toi...? Y'a un truc qui te plaît la dedans...?

Comment dire...
Solveig regardait le rayon avec une certaine incompréhension. Elle comprenait difficilement l'intérêt de ce genre de chose.

Peut-être que l'"amoncellement" des sous-vêtements sur des cintres n'avait rien d'attirant, et c'était peut-être pour ça qu'elle n'en comprenait pas l'intérêt.

A tout hasard, elle attrapa le premier qui vint à portée : un string noir... Un peu trop "ficelle".
Elle se mit à le tourner un peu dans tous les sens, cherchant ce qui pouvait bien être attirant là-dedans.
Visuellement, ce n'était pas terrible : un string noir, avec un peu de dentelle sur le haut et rien d'autres. Mais le produit n'était pas trop cher... Une sorte de bas de gamme ?
A tout hasard, elle le passa entre ses doigts, cherchant à identifier la texture.

C'était... Doux, étrangement. Loin d'être une sensation désagréable. Mais quelque chose semblait lui échapper, encore.
Pour Solveig, le sexe se limitait à des "capteurs de plaisir" qui envoyait un message à son cerveau. C'était une vision scientifique, hautement ancrée en elle, qui avait tendance à la déconcentrer lors de l'acte.
Du mal à comprendre la sensualité, l'érotisme... A ressentir ce moment partagé à deux, ou à plus que deux.

Elle continuait à "caresser le tissu", tout en étant dans ses pensées. Même si elle pouvait expliquer le pourquoi de la sensation, il y avait quelque chose d'autre.

Solveig reposa le string sur son rayon, regardant à gauche et à droite.

- Je ne sais pas trop... J'ai du mal à comprendre ce qu'il en est.

Un mannequin, sur la gauche, portait un boxer féminin aguicheur.
Majoritairement en dentelle, il couvrait le fessier tout en laissant assez d'espace entre les mailles pour laisser deviner la peau. Comme des pixels, en quelque sorte.
Elle s'en approcha, et comme pour le string, se mit à toucher la matière.

C'était légèrement plus granulé comme sensation, cela s'expliquait par les mailles. Mais l'élasticité du tissu, resserrant parfaitement le fessier du mannequin procurait, à nouveau, une sensation étrange à Solveig.  
Entre la rigueur avec laquelle le sous-vêtement enfermait le fessier, et le léger espacement qui permettait de deviner la chair.
Ca donnait envie de l'enlever.

- Celui-ci me plait bien.

Dit-elle, en le pointant du doigt.

Encore une fois, Solveig et Skye se retrouvaient à deux dans une cabine d'essayage.
Cette fois-ci, ce n'était pas pour "échapper" à la foule, mais pour que sa nouvelle amie puisse essayer les sous-vêtements sexy.
Juste avant de passer le rideau, Solveig avait aperçu la précédente vendeuse les regarder avec un léger sourire en coin, laissant une Solveig perplexe.
Pourquoi souriait-elle ? Elle se moquait ?

A l'intérieur, Solveig se retourne, répondant à la demande de Skye.
Elle en profite pour sortir son nanocom et répondre à Vincent.

Solveig a écrit:

Désolée, j'ai oublié. Je suis au centre commercial pour racheter des croquettes à Ronron, je passerai à la boutique informatique ensuite.
Ne m'attends pas.

Message envoyé, elle range son nanocom et... Attend.
Elle avait très envie de voir ce que donnait les vêtements, non pas pour mater sa compère, mais simplement pour voir ce qu'il en était et comprendre cette fascination des autres pour ce genre de vêtements.

Le silence lui pésait légèrement.
Silence tout relatif, entre les bruits faits par Skye pour essayer et le brouhaha à l'extérieur.
Etrangement, Solveig se sentait comme dans une sorte de bulle, et cela la faisait sourire. La situation était cocasse, mais c'était peut-être dérangeant.

- Désolée de m'imposer comme ça. Et merci. Ca te dit de venir avec moi à la boutique informatique ? C'est hors du centre commercial, à quelques rues. C'est une toute petite boutique mais qui regorge de trésors ! Et en plus, soit il vend le matériel construit, soit il vend les pièces et tu peux le monter toi-même ! Ca coûte bien moins cher.

L'alégresse de Solveig montait doucement en crescendo, et devenait de plus en plus palpable.

- Je lui ai demandé de me trouver une pièce, d'ailleurs ! Pour faire un ordinateur un peu particulier !

Elle en sautillait presque de joie à l'idée.

- Par contre, ça va demander du temps et du travail.Mais ça ferait comme heu... Une sorte d'ordinateur bracelet. Enfin, pas vraiment bracelet, ça serait trop petit et on a déjà les nanocoms, mais sur l'avant-bras. Avec un écran repliable, un clavier extensible !

Elle s'était alors retournée,  montrant son avant-bras à Skye et commençant à mimer les gestes d'ouvrir un écran fictif sur son avant-bras et de commencer à tapoter un clavier imaginaire.

- Ca serait top, tu ne trouves pas ?! ... Oh pardon !

Elle se retourna immédiatement, ayant rapidement aperçu le boxer sur Skye, les joues un peu rougies de cette maladresse.

- Ca... Te va bien, en tout cas.

C'était peut-être légèrement déplacée, mais bon.

- Merci. J'aime bien aussi. Le string, c'est un peu plus... bizarre, mais je vais quand même le garder. J'pense que j'aurais pas l'occasion de revenir dans ce magasin avant un moment...

Solveig découpa les dires, afin de dissocier parfaitement les idées dans son esprit.
Elle aimait bien le boxer, apparemment. D'ailleurs, elle ne l'avait pas réprimandé pour sa "maladresse".
Concernant le string, bien que n'en ayant jamais porté, Solveig se dit qu'effectivement, avoir fin tissu entre les deux fesses ça ne devait pas être agréable. Et puis ça devait démanger à terme.
Peut-être qu'on s'y habituait mais Solveig était incapable de confirmer ou d'infirmer l'idée.
Quant à l'occasion de revenir dans le magasin avant un moment, elle faisait allusion à sa mutation, certainement.

- On pourra y revenir ensemble, si tu veux ! Enfin, c'est... C'est... Assez étrange comme proposition. Surtout que nous n'avons pas de quoi échanger mais... Enfin, si tu as envie, ce n'est pas impossible.

Elle avait répondu, toujours face au mur.
C'était d'ailleurs une expérience étrange de parler à un mur... En quoi ? Ce serait à déterminer.
Dans tous les cas, ces propos étaient simplement une invitation, pas une obligation. Mais elle ne savait pas comment amener exactement l'idée.
Au pire, Skye pourrait toujours poser une question si un doute subsistait.

- C'est pas bête, avec un ordinateur comme ça, tu gardes une bonne liberté de mouvement pour faire autre chose à côté. Expériences, mesures... Et ça, tu trouves comment?

- Je trouve ça bien et pratique. Comme tu dis, ça permet de garder une bonne liberté de mouvement, et...

Non. Elle ne parlait pas de l'ordinateur.
Solveig reconnecta ses neurones au contexte actuel.
Skye essayait des sous-vêtements et Solveig, par mégarde, avait vu l'un d'entre eux sur elle.
Et elle avait fait un compliment.
Skye l'invitait-elle à regarder à nouveau ? Peut-être...

Au cas où, elle décida de jeter un oeil par-dessus son épaule et vit Skye, la regardant, le T-Shirt légèrement relevé pour lui montrer la culotte.

- Ah... Heu... Je... Je...

Elle devenait rouge, au fur et à mesure.

- Je... Ne suis pas très douée, tu sais. Mais c'est joli, et ça te va bien également. La dentelle ne te démange pas ?

Elle avait dit cela en finissant par se retourner, regardant et observant la culotte portée par Skye.

- C'est confortable ?

Solveig avait posé, plus ou moins sans gêne, ses mains sur les épaules à Skye pour la faire tourner, doucement, tout en observant la culotte.
Elle se rendit compte, alors, que malgré sa taille Skye avait un semblant de muscles. Plus conséquent que Solveig, mais ça, c'était facile. Elle ne faisait pas de sport et était vivait plutôt en patachon. Ce qui lui permettait de rester mince, c'était le fait qu'elle mange peu.

- Tu fais du sport ?

Et tandis que le corps de Skye continuait à tourner, lentement, sur elle-même... Il se passa quelque chose d'étrange en Solveig.
Elle eut du mal à dissocier, ce qu'elle voyait, de toutes ses œuvres d'art, passées, présentes et certainement futures, qui chantent les louanges de la beauté féminine.
Une étrange force intimidait à la jeune étudiante d'observer, de regarder, d'admirer ce corps de chaire et de muscles, tournoyées. Vision qui l'attirait, d'une bien étrange façon.
Elle ne pouvait l'associer à l'idée du désir, n'ayant pas vraiment connaissance de ce sentiment.
Et ce qui était encore plus étrange, c'était que Vincent ne lui prodiguait nullement cette sensation. Mais à l'heure actuelle, cette dernière information était hors de portée de son esprit... Peut-être qu'elle lui reviendra plus tard.

Sans vraiment faire attention à ce qu'elle faisait, Solveig avait passé un doigt sur la dentelle de la culotte, et en faisait le tour.

- C'est tout doux...

Bien que la gestuelle soit légèrement déplacée, il n'émanait de Solveig aucune émotion lubrique.
Elle ne faisait que "découvrir".

- Pas de quoi échanger...? Tu veux dire, discuter? Je te file mon numéro, si tu veux. Mais revenir ici... Je te rappelle qu'on est hors la loi, techniquement.

- Oui, c'est ça. Enfin, si ça te dit ! Mais oui, garder contact avec toi, ça me plairait. Et oui, tu as raison... On verra.

Elles s'échangeront leur contact plus tard. Là, en train de se déshabiller et d'essayer les sous-vêtements, ce n'était pas vraiment le moment.

Quand Solveig pose la question du sport, Skye lui répond, l'air un peu gênée.
Ce qui fait penser à la jeune étudiante du FATE que sa récente amie n'est autant pas à l'aise qu'elle, pour les interactions sociales, ou pour s'affirmer.
Ce manque de confiance était un réel problème dans la construction de la personne. Il faudrait... Construire ça.
Enfin bon, interagir plus avec l'environnement, ça n'intéressait pas spécialement Solveig non plus.

- C'est tout doux...

- Euh, ouais. Bah, heureusement, hein? Ça serait quand même moins sympa à porter sinon...

- Heu... Pardon.

Elle retire vivement sa main, comme si elle avait touché une quelconque flamme.

- Désolée, c'était déplacé de ma part et je n'ai pas fait attention... J'ai du mal à comprendre tout cela, mais ça m'intrigue. Encore désolée, j'éviterai de le refaire. Tu ne t'es pas fait mal au moins ?

Légèrement honteuse, elle se tourna à nouveau vers le mur, tout en grattant sa joue rougie par sa prise de conscience.

- Bon, maintenant, opération paiement... Et on file de là! On a déjà pas mal poussé la chance.

- Oui, je suis d'accord.

Solveig s'approcha du rideau de la cabine, qu'elle tira.
Elle passa légèrement la tête hors de la cabine, regardant à gauche et à droite pour définir le chemin où elles rencontreraient le moins de monde possible.
Chose déterminée, elle reprit à nouveau la main de Skye dans la sienne et se dirigea vers la caisse, tout en faisant un chemin tordu à travers le magasin.

En arrivant devant la caisse, elles déposèrent leurs articles, tandis que la vendeuse affichait un sourire.
Deux kigurumis et trois sous-vêtements sexy... Solveig ne voyait pas ce qu'il y avait d'amusant, là-dedans, mais bon.

"Vous avez trouvé ce qui vous plaisait, mesdames ?"

Drôle de question, si ça n'avait pas été le cas, elles n'auraient rien pris, si ?
Vraiment, Solveig ne comprenait pas tout.

- Heu... Oui.

Tandis qu'elle enregistrait les articles, le regard de la caissière passait subtilement de Solveig à Skye, avec toujours ce léger sourire.
Solveig patientait sagement, les mains dans les poches de sa blouse.
Quand elle annonça le prix, Solveig tendit sa main avec l'omnipuce, ce qui provoqua un nouveau commentaire.

"Voulez-vous que nous emballions certains articles dans du papier cadeau si c'est pour offrir ?"

Solveig jeta un regard à Skye, ce qui amusa encore plus la vendeuse.

- Heu... Non, ça ira, merci.

"Très bien Mesdames, alors je vous souhaite une belle journée."

- Merci, à vous aussi...

Puis elle prit le sac et se dirigea vers la sortie, reprenant la main de Skye dans la sienne, sous le regard amusé de la vendeuse.

- Il y avait des sous-entendus ou je me trompe complètement ?

Elle poussa un soupir, beaucoup trop de choses lui restaient inconnues.

- Bon, je vais aller à la boutique... Ca te dit une glace ?

Elle se rendit compte qu'elle tenait toujours la main de Skye dans la sienne et elle la relâcha, souriant simplement.

- Désolée, c'était déplacé de ma part et je n'ai pas fait attention... J'ai du mal à comprendre tout cela, mais ça m'intrigue. Encore désolée, j'éviterai de le refaire. Tu ne t'es pas fait mal au moins ?

Mal...? Ah, en me cognant conte la cabine. Un rapide "non" de la tête, j'ai pas sursauté si fort.

En sortant de la cabine, on traverse le magasin jusqu'aux caisses. J'imagine que l'ensemble des articles donne un côté un peu inhabituel à notre "couple", mais j'évite de croiser le regard de la vendeuse. D'une part parce que si elle ose se foutre de moi, je la démonterai, mais aussi parce que mes yeux ne sont pas forcément ce que j'ai le plus envie de montrer, en cet instant précis...

"Vous avez trouvé ce qui vous plaisait, mesdames ?"

- Heu... Oui.

Je la laisse faire. Je suis certaine que la vendeuse me regarde, mais je reste derrière Solveig. C'est ridicule, je dois avoir l'air de la "petite amie timide" dans son dos. Elle paye avec sa puce, et on lui demande si elle veut emballer les articles. Elle me regarde - autant directement lui dire "Oh bah non écoutez, c'est elle qui va les porter, c'est pour consommer tout de suite". Bordel... Je baisse quand même les yeux. Si je me met à réfléchir maintenant, on est grillées.

- Heu... Non, ça ira, merci.

"Très bien Mesdames, alors je vous souhaite une belle journée."

- Merci, à vous aussi...

On sort avec les vêtements, main dans la main. L'instant ou je passe le portique, j'ai l'impression qu'une chaîne qui me compressait la poitrine éclate d'un coup. Bizarrement, avec le recul, c'était plutôt... Cool. Bon, si on pense pas à la sanction encourue.

- Il y avait des sous-entendus ou je me trompe complètement ?

- Légèrement, ouais... Et c'était pas très professionnel de sa part, d'ailleurs. Sérieux, ça la regarde, les histoires de cul des clientes...?

Elle a vraiment l'air à la masse sur certains trucs. Je connais personne qui n'aurait pas vu les regards insistants, limite lourdingues, de la caissière.

- Bon, je vais aller à la boutique... Ca te dit une glace ?

La boutique informatique... Bah, pourquoi pas. De toutes façons, j'ai rien de mieux à faire aujourd'hui, je sèche... Une glace? Si elle veut, après tout, mais... Cette fille fonctionne vraiment pas comme tout le monde, je me demande si je serais capable de sociabiliser avec elle.

- D'acc, si tu veux. Et puis, celle là, je peux te l'offrir, c'est pas réservé aux citoyens comme boutique...

Attends, mais... Elle était déjà en train de manger une glace quand je l'ai vue sur le banc...? La vache, elle est bizarre, cette fille.

On redescend de deux étages, cherchant des yeux la première enseigne susceptible de vendre des glaces. Y'a des distributeurs aussi, mais elles sont dégueulasses... Quand on finit enfin par trouver quelqu'un qui en fait, je me place devant Solveig, prête à donner ma carte de bitcoins.

- Tu veux quoi...?